Une exposition
remarquable
à la cinémathèque,
à sa hauteur.
On découvre son oeuvre à la
cinémathèque qui présente une
exposition très riche de cet artiste.
On le connait sans presque
le savoir. Oui on connait ces
chats drôlement peints qui le
caractérisent à l’entrée de son
domicile, dans le 20e.
Il les adorait. Ce grand artiste
multiforme est un petit gars du
20e,. Il lui est resté fi dèle jusqu’à
ses 91 ans, dans ce grand atelier
où ce cinéaste, mais aussi
cet écrivain, plasticien, photographe,
musicien, inventait et
où il nous a quittés en 2012.
Un créateur multiforme
et étonnant
Le fi lm « la Jetée » est une de
ses oeuvres les plus connues.
C’est un récit de science fi ction
constitué d’images fi xes et
d’une voix off qui vibre sur la
thématique de l’écoulement du
temps. Il a infl uencé maints cinéastes,
en particulier Terry Gillian
avec « l’armée des singes ».
Il était un cadreur hors pair qui
montait ses images pour faire
jaillir des idées, des infl uences,
des sens. Dix ans plus tôt, il réalise
avec Alain Resnais « les statues
meurent aussi » (1953) qui
part d’une interrogation : pourquoi
l’art dit « nègre » se trouvet-
il au musée de l’homme quand
l’art grec se déploie au Louvre ?
Réquisitoire anticolonialiste
et antiraciste, ce fi lm se fait si
subversif qu’il sera interdit par
la censure pendant 11 ans.
Un artiste visionnaire
Avec un instinct prémonitoire,
il filme la longue grève des ouvriers
de la Rhodiaceta au printemps
1967 ; comme la France
en connaitra des milliers, l’année
suivante.
Réalisé avec un ouvrier, Mario
Marret, ce fi lm nous fait partager
la condition ouvrière allant
jusqu’à l’intimité de leur maison.
Dans « le fond de l’air est
frais » tourné en 1977, il agrège
les utopies révolutionnaires, de
Lénine à Che Guevara.
Il ne recevra qu’une seule récompense
offi cielle, celle du
prix de la critique internationale
en 1963, au festival de Cannes,
pour « le joli mois de mai ».
L’influence grandissante
de son oeuvre alors
qu’il s’était toujours tenu
à l’écart des médias
Comme pour se fondre dans
la cité, Chris Marker a pris de
nombreux pseudonymes. Christian
de Bouche-Villeneuve, de
son vrai nom, s’est même créé
des avatars comme Sergei Marasaki,
dans son jeu vidéo « Second
life ».
De la même façon, à partir de
1970, il a fui les studios de télévision,
s’est oublié dans une
oeuvre éblouissante et multiforme
dont on ne fi nit pas de
cerner les contours.
Il a laissé presque 600 cartons
dans son atelier. Et on a failli
jeter une oeuvre d’art : une bouteille
de « Cristalline » avec d’un
oté le tableau de Munch et de
l’autre le portrait du dirigeant
russe. Inclassable, visionnaire, il
n’a pas d’héritier au sens strict
mais il est devenu culte car on
n’en fait jamais le tour.
Dans « l’héritage de la chouette »,
série documentaire diffusée en
1989, qui présente une réfl exion
très vivante sur l’infl uence de la
Grèce antique de nos jours, il a
ce mot magnifique : « faudra-til
dire de la démocratie ce que
quelqu’un a dit du bonheur.
Cette chose qui n’existe pas et
qui pourtant, un jour, n’est plus.
Courez découvrir Chris Marker,
un artiste, un créateur, un
visionnaire. ■
Chris Marker, les 7 vies d’un
cinéaste, jusqu’au 29 juillet à la
Cinémathèque
LAURENCE HEN