Les
morts de la rue
Une
association se souvient
Chaque année,
près de 2000 personnes décèdent dans la rue, parfois de maladie,
parfois suite à des violences, parfois de froid, parfois
d’épuisement…
À l’aube du nouveau
siècle, confrontés à l’effroyable mortalité des SDF, quelques
membres de l’association catholique « Aux Captifs la
libération » décident de contacter diverses organisations
caritatives telles ATD-Quart Monde ou La Mie de Pain pour connaître
le nom des disparus, créer une sorte de fichier commun. Plusieurs
structures laïques adhèrent au projet et le collectif « Les
Morts de la rue » est officiellement créé en 2002.
Pour les bénévoles, il
s’agit alors surtout de « faire savoir que vivre à la rue
mène à une mort prématurée » : constatant que
l’espérance de vie moyenne d’un SDF est de 48 ans contre 80 ans
pour la moyenne nationale, les responsables tentent d’alerter la
population en rendant publiquement hommage aux victimes de la
précarité.
Des manifestations sont
ainsi organisées dans les grandes villes (Paris, Bordeaux,
Grenoble). Le nom des personnes décédées est alors lu, et des
fleurs sont déposées au sol, en guise d’hommage.
Retrouver qui ils
étaient
Depuis 2015, plusieurs
volontaires effectuant un service civique réalisent également des
démarches autour du voisinage en collant des affiches, pour savoir
qui étaient au juste les malheureux découverts sans vie, de
prévenir une éventuelle famille. Accompagné de photos, le blog
« Mémoire de la rue » décrit ainsi le parcours de
plusieurs « morts de la rue », et témoigne d’un
patient travail de recherche.
Il s’agit aussi de
faire revivre les SDF, ces existences parfois invisibles, de prendre
des photos des lieux traversés, de faire parler les gens qui les ont
côtoyés, au hasard des squares, des bancs. Le nom des SDF, les
quelques informations glanées parfois difficilement, apparaissent
ainsi directement sur le site Internet.
Les funérailles au
cimetière de Thiais
En lien avec les
instituts médico-légaux, le collectif tente aussi de dénoncer les
causes, généralement violentes des morts, tout en veillant à la
dignité des funérailles. Le plus souvent inhumés au carré des
anonymes, notamment au cimetière de Thiais, les morts de la rue sont
accompagnés dans leur dernier voyage par un membre de l’association,
qui prononce à cette occasion quelques paroles, une oraison. Le cas
échéant, les proches sont contactés et soutenus. À l’heure où
hélas le nombre de sans-abris se multiplie, où une forme
d’habitude, pour ne pas dire d’indifférence, s’installe, le
travail d’un tel collectif force évidemment le respect.
Etienne Ruhaud
Association « Les
morts de la rue »
72 Rue Orfila,
01
42 45 08 01
06 82 86 28 94
mortsdelarue@free.fr